[vc_row][vc_column width="3/6"][vc_column_text]L’effervescence sociale et politique se fait sentir sur le continent de l’Abya Yala et amène un nouvel espoir. Malgré la pandémie et ses graves conséquences, on sent un vent de changement souffler. Les deux dernières années, passées entre confinement, restrictions et mesures autoritaires, semblent être derrière nous, mais les conséquences ont été nombreuses sur les communautés. Les inégalités sociales se sont creusées et la violence n’a guère cessé à l’égard des personnes défenseures et des militantes qui sont sorties dans les rues et ont réinventé plusieurs formes de résistance. Assistons-nous à une effervescence collective qui serait porteuse d’un processus de changement et de transformation sociale tant espéré ?
De Petro-Márquez en Colombie, à Gabriel Boric au Chili et à Lula au Brésil, des gouvernements progressistes reprennent enfin le pouvoir, portés par cette vague effervescente de mobilisations sociales qui déferle sur l’Amérique latine depuis 2018.
En Équateur, les grèves nationales de 2019 et 2022 où la population a pris la rue contre des réformes menées au niveau politique, nous rappellent que seule la lutte sociale organisée permet de faire entendre ses demandes et défendre ses droits.
En Colombie, les mobilisations sociales entre 2019 et 2021 ont aidé à faire élire un gouvernement progressiste. Mais après l’effervescence de la victoire, il importe de se demander si le nouveau gouvernement sera réellement en mesure d’apporter les changements promis et tant espérés par la population colombienne.
Au Chili, malgré les espoirs déchus par le refus de la nouvelle Constitution qui pourtant signifiait d’importants avancements pour les droits, notamment des Autochtones et des femmes, les mobilisations sociales ont tout de même permis ce processus de changement pour la première fois depuis la fin de la dictature.
Certains des textes de ce numéro nous rappellent que la lutte pour la dignité et la paix est loin d’être gagnée. Pendant la pandémie, le grand capital s’est enrichi, notamment les entreprises minières, protégées par les gouvernements sous le discours de services essentiels, comme au Mexique où l’on n’a pas hésité à qualifier cette situation de pandémie minière. Dans d’autres pays comme au Guatemala, un pays déjà meurtri par un génocide et la dépossession, depuis l’arrivée du gouvernement Giammattei en janvier 2020 et le début de la pandémie, la criminalisation des personnes défenseures n’a pas cessé d’augmenter. Cette violence n’a toutefois pas réussi à faire taire les initiatives sociales, communautaires et politiques.
Tout au long de ce numéro, la poésie nous transporte dans les profondeurs des injustices et la portée des résistances. À travers le continent, des initiatives, rassemblements et alliances s’avèrent nécessaires, comme en témoignent le Forum social panamazonien et l’assemblée pancanadienne de l’Alliance internationale des femmes dont nous entendrons parler dans ces pages. Partout, des femmes s’unissent pour mener les luttes environnementales, sociales, anti-impérialistes, antiracistes et antipatriarcales.
Cette année, Caminando est en plein bouillonnement. Tout nouvellement présente sur les réseaux sociaux, principalement sur Facebook, ce numéro est aussi le premier à être distribué à travers le Québec pour la toute première fois depuis sa création en 1980. La revue est désormais disponible en librairie aux quatre coins de la province de Québec par l'entremise de Diffusion Dimédia. En plus de nous avoir permis de rejoindre ce réseau de distribution, notre adhésion à la Société de développement des périodiques culturels québécois (SODEP) amène également l'occasion de réseauter et de positionner la revue comme outil essentiel d’éducation et de diffusion en français des luttes en Amérique latine à de nouveaux lectorats.
Avec cette édition, nous achevons quatre numéros ayant porté sur la pandémie de COVID-19. Nous avons voulu documenter cette période historique particulière, comme Caminando a toujours su le faire, ainsi que les impacts en Amérique latine où elle s’est avérée être dévastatrice, mais où elle a fait émerger des initiatives de solidarité et d’espoir. Nous ferons place en 2023 à deux numéros portant sur les impacts sur la santé, les femmes et les communautés de l’industrie minière canadienne en Amérique latine. Le prochain volume nous permettra de faire état de la militarisation des territoires, de l’augmentation de la violence et de la présence du crime organisé, du discours post-pandémique et d’exploitation minière verte, mais aussi de l’autodétermination des peuples, d’expériences d’espoir, d’alternatives, de résistances, provenant de textes de personnes militantes et de communautés affectées.
Nous aimerions remercier toutes les personnes ayant généreusement contribué de près ou de loin à ce numéro : personnes autrices, illustratrices, traductrices, réviseures, ainsi que les membres du comité éditorial. Les superbes illustrations des couvertures de ce numéro ont été réalisées par Liana Perez et nous la remercions pour son engagement et sa créativité.
Nous souhaitons souligner le précieux soutien de la Société des Missions étrangères qui appuie la production et le développement de la revue depuis 2019. Nous remercions également tous nos partenaires qui soutiennent financièrement la revue ou nous appuient pour en faire la promotion et la diffusion.
Lectrices, lecteurs, nous espérons que ce numéro vous plaira et attisera votre désir de solidarité avec les peuples et les mouvements sociaux qui luttent pour la vie et les territoires.
Bonne lecture ![/vc_column_text][/vc_column][vc_column width="1/6"][/vc_column][vc_column width="2/6"][vc_column_text]Éditorial | Marie-Eve Marleau et Roselyne Gagnon
Équateur en grève : résistance et répression, un appel à la solidarité internationale | Gladys Calvopiña Herrera
Conflit social colombien : qu’est-ce qui attend le gouvernement de Petro et Márquez ? | Projet accompagnement solidarité Colombie (PASC)
Au Chili, la révolution continue, malgré la campagne de peur, la désinformation et la pandémie | Ricardo Peñafiel
L’odeur de la bataille | Sharon Pringle Félix
Amour de manif | Sharon Pringle Félix
Déracinement et pandémie : la lutte de Festivales Solidarios au Guatemala et en exil | Lucía Ixchíu, Carlos Ernesto Cano et Mélisande Séguin
Peuples autochtones : autogestion et résistance face à la pandémie et à la négligence de l’État au Guatemala | Brigades de paix internationales
L’espoir en image | Andres Garcia
Rêver en quarantaine | Lucia Ixchiu
La cohérence | Lucia Ixchiu
Déclaration panamazonienne de Belém | Xe Forum social panamazonien (FOSPA)
Femmes défenseures de la terre et de la vie : plusieurs luttes, un seul combat | Alliance internationale des femmes (IWA)
Hibiscus, Dahlia et Asclépiade | Simone Philpot
Mexique : Industrie minière, pandémie et enrichissement. À qui bénéficie la crise sanitaire? Entrevue avec Libertad Díaz Vera | Rosalinda Hidalgo
Choya, c’est aussi moi | Ana Chayle[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]abc
[vc_row][vc_column width="3/6"][vc_column_text]Le contexte de la pandémie de COVID-19 a affecté tout le monde, certes, mais pas tous et toutes de la même manière. Au-delà du « ça va bien aller », elle a exacerbé les graves problématiques sociales, économiques et environnementales. Les mesures sanitaires et gouvernementales pour y faire face ont eu des impacts importants sur les droits des communautés. Dans plusieurs pays en Amérique latine, le slogan « rester chez soi », importé du Nord, qui allait soi-disant sauver des vies, a plutôt eu un effet inverse. Dans un contexte où gagner sa vie implique de sortir de chez soi, le respect de ces mesures signifie mourir de faim pour de nombreuses personnes. D’ailleurs, les décès dus à la faim, bien qu’ils soient difficiles à comptabiliser, auraient désormais dépassé ceux causés par la COVID-19.
Comme toujours, le capitalisme et son corollaire, l’extractivisme, ont contourné la crise et en ont profité pour poursuivre l’exploitation illimitée de la nature et engendrer des profits astronomiques. Pendant que la pandémie impliquait la perte de proches et entraînait une avalanche de pertes d’emplois et de revenus, résultant en une augmentation de la pauvreté extrême et de la faim, la richesse des dix hommes les plus riches au monde, quant à elle, a plus que doublé. On compte un nouveau milliardaire toutes les 26 heures depuis le début de la pandémie, mais les inégalités, elles, causent la mort d’une personne toutes les 4 secondes à travers le monde[i].
En Amérique latine, de nouvelles formes de résistance sont nées devant l’absence de soutien étatique. Ce sont les mouvements sociaux et les communautés les plus touchées, avec les femmes à l’avant-plan, qui ont organisé des réseaux de solidarité et d’entraide pour répondre aux besoins de leurs concitoyen·ne·s : livraison de produits alimentaires, popotes populaires, brigades d’agent·e·s de santé communautaires, entre autres. On a travaillé à construire des plans d’autosuffisance sanitaire. Différents groupes et mouvements sociaux se sont tournés vers le virtuel pour poursuivre leurs activités et actions.
Des voix sont descendues dans les rues de plusieurs pays – dont le Guatemala, la Colombie, le Chili et le Brésil – pour exprimer leur mécontentement et leur désir de changement. Présent depuis des décennies, ce mécontentement s’est exprimé haut et fort, réunissant divers secteurs de la société, entre autres les jeunes, les femmes et les peuples autochtones, ravivant les voix historiquement marginalisées et résultant en des mobilisations citoyennes sans précédent.
De nombreux mégaprojets extractifs ont poursuivi leur cours, ayant été déclarés comme activités essentielles tôt après le début de la pandémie. Cette dernière s’est ajoutée à la pression déjà subie par les communautés, dont les peuples autochtones, pour défendre leurs territoires contre l’extractivisme vorace qui cherche à les transformer en région de développement pour des intérêts privés. C’est le cas, entre autres, du mégaprojet controversé et mal-nommé du Train Maya et de la minière Cuzcatlán au Mexique, qui nous sont présentés dans ce numéro. Utilisant les besoins exacerbés des populations pour redorer leur image, les entreprises extractives ont engendré des profits alors que la population traversait la pandémie en pleine sécheresse.
En Colombie, un projet de réforme fiscale visant à augmenter les taxes et touchant entre autres, les produits de base, a été l’étincelle d’une grande grève nationale de huit semaines, à partir de la fin avril 2021. La colère sociale, qui grondait déjà depuis 2008, avec des mobilisations autochtones et étudiantes, a éclaté par la réponse violente du gouvernement. Malgré le vent d’espoir que les élections de mai 2022 laissent présager, un panorama d’incertitude, d’instabilité, de répression et de violence se dessine.
L’instabilité politique ne laisse pas pour autant les communautés inactives. En Bolivie, des comités déjà formés à la suite du coup d’État de 2019 se sont mobilisés pour pallier l’absence de soutien de base dans un contexte de confinement strict pendant la pandémie. Malgré l’interdiction de circuler, des collectes et distributions de denrées alimentaires et de kits de médecine ancestrale ont eu lieu dans les zones périphériques de Cochabamba. Voulant garder une indépendance politique, ces actions se sont voulues être une expression de la lutte anticapitaliste, anticolonialiste et antiraciste.
Au Chili, les inégalités, déjà fortement présentes, se sont accentuées avec la pandémie. La mobilisation sociale d’octobre 2019 qui mettait en lumière ces fortes inégalités a été ravivée après quelques mois de pandémie devant la colère et la faim de la population. Des initiatives de popotes populaires ont ainsi vu le jour pour répondre aux besoins de base des populations vulnérables, sous le slogan « seul le peuple aide le peuple ».
L’action politique et la mobilisation se vivent également à travers des initiatives de médias numériques engagés, comme c’est le cas de RUDA femmes+territoires au Guatemala qui contribue à la lutte féministe, en tant qu’outil de contestation et de défense des territoires historiquement transgressés et épuisés par les violences multiples. Des organisations se sont également préoccupées de garder des liens étroits avec des populations marginalisées et en situation de précarité, comme c’est le cas du collectif Tajpianij à Cuetzalan au Mexique.
Les voix qui se rejoignent pour former ce numéro de Caminando proviennent des quatre coins du continent et sont porteuses d’espoir en ces temps incertains. Elles témoignent de la résistance, de la créativité et de la solidarité nécessaires à la construction d’alternatives face au capitalisme destructeur et à l’extractivisme qui s’accentuent malgré un contexte aussi particulier que celui d’une pandémie mondiale.
Nous vous invitons donc à parcourir les pages de ce numéro qui a été rendu possible grâce à la contribution essentielle des auteurs·trices, poètes, illustrateurs·trices, traducteurs·trices, réviseur·e·s, membres du comité éditorial et nos précieux partenaires. Nous remercions chacune des personnes pour leur implication. Nous espérons que ce numéro contribuera à une réflexion sur les inégalités préexistantes exacerbées et celles engendrées par la pandémie.
Bonne lecture,
Marie-Eve Marleau et Roselyne Gagnon
[i]Oxfam international (2022). « La fortune des dix hommes les plus riches du monde a doublé pendant la pandémie alors que les revenus de 99 % de la population mondiale ont été moins importants à cause de la COVID-19 », en ligne : https://www.oxfam.org/fr/communiques-presse/la-fortune-des-dix-hommes-les-plus-riches-du-monde-double-pendant-la-pandemie[/vc_column_text][vc_empty_space][vc_column_text]Crédit illustration de couverture : Liana Perez[/vc_column_text][/vc_column][vc_column width="1/6" css=".vc_custom_1645557528558{padding-left: 20px !important;}"][/vc_column][vc_column width="2/6"][vc_column_text]Éditorial | Marie-Eve Marleau et Roselyne Gagnon
Je suis sortie dans la rue | Sharon Pringle Félix
La contestation féministe sur le territoire-corps dans les médias numériques | Andrea Rodríguez, Ketzali Pérez, Marta Karina Fuentes et Lise-Anne Léveillé
La pandémie dans la vallée d’Oaxaca : des communautés sans eau et une entreprise minière enrichie | Fernanda Sigüenza Vidal
La solidarité en temps de pandémie avec le collectif Nuestra Olla Común | Nasya S. Razavi et Ida Peñaranda
TOUT EST POSSIBLE ! Le rêve du Paro Nacional en Colombie | Projet Accompagnement Solidarité Colombie (PASC)
Je suis de la génération du ne pleure pas | Sharon Pringle Félix
Résister en pandémie : les peuples autochtones mayas face au mal-nommé Train Maya | Rosalinda Hidalgo
Pandémie et mobilisation sociale au Chili : éthique du soin et nouvelles perspectives | Isabel Orellana et Gabriel Poisson
Nicolas Guerrero | Iván López
Mouvements sociaux au Chili : écoféminisme et interculturalité | Ivette Doizi
L’importance des Actions urgentes en soutien à la résistance en Amérique latine depuis le Canada | Équipe des actions urgentes du CDHAL
Être autochtone, pauvre et étudiant·e face à la pandémie de 2020 et 2021. Une organisation de jeunes et la COVID à Cuetzalan, Puebla | Ignacio Rivadeneyra
Résistance | Martin Pouliot[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]abc